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La France des déconnectés

    Suite à la publication de l’étude Unplugged – La France des Déconnectés, réalisée par Havas, Dominique Delport recevait ce matin une quinzaine de personnes, dont Maud de Curiouser, pour échanger autour des problématiques de déconnexion. Tout a commencé, explique Dominique Delport, quand Havas s’est intéressé aux déconnectés 2.0, ceux qui, à l’instar de Thierry Crouzet (et son ouvrage « J’ai débranché), se déconnectent de façon volontaire.

    Mais cette population d’internautes n’est pas la seule à se détacher d’Internet : il y a ceux qui subissent la fracture numérique, ceux qui ne disposent pas des connaissances pour s’approprier les outils, et qui, de fait, sont exclus du digital, ceux qui n’ont pas les moyens… Autant de populations  (représentant 25% des foyers français, voire même 57% des foyers aux revenus inférieurs à 1 500 euros par mois) qui ont donc été étudiées et rassemblées au sein de 4 groupes archétypaux : les Déconnectés 2.0, les Flippés, les Minitélistes et les Exclus. Avec bien sûr quelques pistes pour adresser ces nouveaux publics, de fait peu réceptifs à la publicité ou à la communication online.

     

     

    Chez Curiouser, l’étude nous a inspiré deux pistes de réflexion liées à des lectures récentes (et moins récentes) :

    1. Monde numérique versus usages numériques
    Il est facile de penser Internet comme un monde numérique dans lequel tantôt on pénètre, tantôt on sort. Or, existe-t-il véritablement un seul et même monde numérique ? Pour reprendre les termes d’une étude menée par des chercheurs de Discours & Pratiques pour la Fédération Française des Télécoms, chacun a son monde un peu / beaucoup / partiellement / presque complètement numérique : « c’est le monde de chaque individu connecté qui est partiellement tramé d’usages numériques qui lui correspondent ». Et les chercheurs de présenter plutôt « d’incessantes petites déconnexions » , plutôt que de penser « le fantasme de la déconnexion radicale ».
    Ainsi, il y avant tout des « moments vécus sur le mode d’un agencement entre des outils, des dispositions corporelles, des situations d’usage, des services et des contenus ».

     

     

    Autrement dit, il serait intéressant d’aller plus loin que les archétypes présentés dans l’étude de Havas en essayant d’identifier précisément les tactiques et les stratégies de détachement de ces populations vis à vis des outils numériques : à quel moment font-elles sans ? A quel moment font-elles avec ? Pourquoi ? Jusqu’où leurs compétences en matière de digital s’arrêtent-elles ?

    2. Peut-on vraiment se déconnecter ?
    Ne pas toucher aux outils numériques est une chose, se détacher émotionnellement du digital en est une autre. Preuve en est l’expérience #mediadeath réalisée par l’Express Infolab en février 2011. Se déconnecter peut finalement revenir à être obsédé par la déconnexion : c’est le concept de Fear of Missing Out, la peur de rater quelque chose sur ses différents réseaux.

    Réseaux sociaux, qui, quant à eux, nous poursuivent aussi dans la « vraie vie », même lorsque nous sommes hors ligne. C’est ce qu’explique Nathan Jurgenson, repris par InternetActu : « La logique des médias sociaux nous suit longtemps après nous être déconnectés […]Il est faux de dire que IRL signifie hors ligne : Facebook est le monde réel ! […] Facebook ne limite pas le offline, mais en dépend. (…) Les photos postées, les opinions exprimées, les check-in qui remplissent nos flux d’information sont ancrés dans ce qu’il se passe quand nous sommes déconnectés. Le web a tout à voir avec la réalité. Il est composé de vraies personnes et de vrais corps, leurs histoires, leurs opinons. Ce sont les objets fétiches de la déconnexion qui ne sont pas réels. ».

    Internet, monde persistant et pervasif, partiellement fruit d’une construction collective, continuerait donc sans nous si nous sommes hors ligne ? Voilà une opinion qui questionne le concept même de déconnexion pour s’intéresser davantage aux usages qui la provoquent. A creuser…

     

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